En rachetant les studios Éclair, l’homme d’affaires franco-tunisien tente de tenir tête aux groupes américains. Répondre aux studios hollywoodiens en appliquant leur stratégie dans la distribution de films. C’est la méthode de l’homme d’affaires et producteur Tarak Ben Ammar, qui vient d’entrer dans Alliance, l’un des poids lourds de la distribution de films indépendants notamment au Canada et en Europe de l’Ouest. Une opération menée avec le concours des fonds SGF (Québec) et Goldman Sachs Equity, qui ont investi 560 millions de dollars canadiens.
Dans la corbeille de mariage, les 4 000 films du catalogue que détient le distributeur canadien, mais aussi les 400 longs métrages de sa filiale britannique Momentum et les 190 films d’Aurum, présent en Espagne. Ce rachat suit de près celui que le patron de Quinta Communications vient de réaliser en Italie, via sa filiale transalpine, en acquérant 75% de la société de distribution indépendante Eagle pour 85 millions d’euros. Tarak Ben Ammar envisage également de «racheter une entité comparable en Scandinavie».
Avec l’apport de son activité de distribution en France, Tarak Ben Ammar et ses associés tentent de créer un réseau paneuropéen qui permet de discuter sur un pied d’égalité avec les studios américains. «Grâce à cette acquisition nous serons présents dans six pays, dont cinq européens. Notre but est de créer un réseau de distribution présent sur tout le continent», explique Tarak Ben Ammar. Et de rappeler qu’«aujourd’hui 550 films sont distribués en Europe chaque année dont 350 par les majors américaines. Restent 200 films dont les deux tiers sont issus du cinéma indépendant américain. C’est ce marché que nous visons en offrant une distribution paneuropéenne. Un avantage non négligeable pour les producteurs à l’heure où il est stratégique de faire les plus larges sorties possibles compte tenu du piratage sur Internet, mais aussi de la nécessité de mutualiser les frais de sortie et les risques d’un film sur différents territoires. Enfin, cela permet d’obtenir la totalité des mandats de distribution sur tous les supports». C’est cette même stratégie que mène son concurrent StudioCanal + (groupe Canal +). En 2006, ce dernier a acheté le distributeur britannique Optimum et était sur les rangs pour l’acquisition d’Alliance.
Une filière en difficulté :
Par ailleurs, Quinta Communications a consolidé hier le marché de la postproduction en France en rachetant à Orkos Capital (BNP) les 49 % qui lui manquaient du fameux studio Éclair qui fait les copies des films dans lequel il était entré en février dernier. Désormais, Tarak Ben Ammar, qui au cours de ces cinq dernières années a su renflouer LTC, l’autre laboratoire français, devient l’acteur unique des industries techniques. Une position qui lui permet de totaliser un chiffre d’affaires de 160 millions d’euros, pour un effectif de 800 personnes.Ce rapprochement paraissait aux yeux des observateurs inévitable compte tenu de la mondialisation du marché, mais aussi des difficultés de la filière. Cette dernière étant souvent celle qui paie le prix des échecs des films. Au cours des cinq dernières années, près de 25 millions d’euros d’impayés ont été supportés par les industries techniques. La France est désormais le seul pays à échapper à l’hégémonie mondiale de Technicolor, filiale de Thomson, actionnaire minoritaire de Quinta communication. À terme, Technicolor pourrait être tenté de s’intéresser davantage au marché français.
Source : Figaro.fr – Paule Gonzalès