Surtout, la couleur donne à voir le vrai visage de la guerre…
En effet. Elle nous replonge directement dans le présent de l’époque, alors que le noir et blanc impose une certaine distance. Nous voilà véritablement dans la véracité de l’histoire. Sur Apocalypse, à partir de nombreuses sources historiques, j’ai pu également travailler sur des détails plus subtils comme les saisons, les heures du jour, etc. Par exemple, l’attaque de Pearl Harbor a eu lieu peu avant 7 heures du matin. La restitution de couleurs traduit la sensation de ce petit matin de décembre. Ou encore, les divers témoignages sur la bataille de Dunkerque décrivent un ciel “désespérément bleu”, j’ai été attentif à reproduire ces ambiances.
Concrètement, quel est le processus de cette restitution de couleurs ?
La première phase consiste en une analyse minutieuse et rigoureuse des images. Avec les équipes de documentalistes, nous effectuons un relevé précis des divers éléments qui composent chaque plan. Je dispose d’une base de près de 25 000 photos d’époque — qui peuvent provenir de bibliothèques des armées, de collections de maquettistes ou encore de musées de la mode — qui me servent de référence, pour retrouver la vérité de l’image d’origine. Ça passe bien évidemment par des informations historiques connues et vérifiées par nos conseillers, comme la couleur des uniformes ou la cocarde des avions, mais aussi par les matières textiles par exemple. La texture d’un tweed ou le reflet d’un cuir sont de précieux indices ! En fait, techniquement, une image en noir et blanc nous renseigne déjà sur une des composantes de la couleur : sa luminance. Le reste (la teinte et l’intensité) est restitué par ce jeu patient et méticuleux d’analogie. On démonte les images pour remonter dans le temps…
Et après ?
Ensuite viennent les opérations techniques proprement dites :
D’abord, le détourage, qui consiste à délimiter les zones à passer en couleur, sachant que ces zones sont généralement en mouvement et qu’il faut les suivre dans l’image. Il y a eu plus de 200 000 objets détourés sur Apocalypse. Chaque zone peut alors recevoir la couleur que nous lui avons attribuée. Mais plutôt que de plaquer directement une couleur, je préfère travailler sur les matières. Il a fallu trouver des solutions pour traduire visuellement la sensation du feu, de la fumée, du brouillard ou du bois. Prenez une pelouse, par exemple. Elle n’est pas, à proprement parler, verte. Ou plutôt, si vous la colorez en vert, elle ne paraîtra absolument pas naturelle. C’est pour cette raison que je repars plutôt de la texture même, à savoir une pelouse existante, filmée en couleur dans les mêmes conditions de lumière, de saison et de temps. Rien que pour cette opération, j’ai constitué une banque de données de plus de 5 000 textures. Enfin, j’ai énormément travaillé sur le rendu des images en mettant au point des algorithmes qui permettent de les vieillir, afin de retrouver le grain du Kodachrome de l’époque.
Il se dégage de toute cette approche une certaine poésie…
Ce travail de restitution de la couleur est très récent et nous sommes encore très peu nombreux à le proposer. Chacun a sa méthode, ses techniques, ses secrets. Il existe, à l’étranger, des sites très industriels. Mon approche est plus solitaire, plus “artisanale” et, je l’espère, plus artistique. En mettant l’accent sur les matières davantage que sur les couleurs, en étant attentif au rendu de l’image, je tente d’apporter ma petite patte personnelle, comme une touche esthétique au service de mes auteurs, Daniel Costelle et Isabelle Clarke.
Source : Site officiel Apocalypse sur France 2.fr
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